Podcast – Pascal Fanton : Pas d’expérience client sans collaboration entre digital et humain.

Podcast – Pascal Fanton

Pas d’expérience client sans collaboration entre digital et humain.

Pascal-Fanton

Nous avons le plaisir d’échanger avec Pascal Fanton, Directeur des Opérations chez Allianz Partners France.

Pascal dirige un service de 1500 personnes, qui est mobilisé 7j / 24h, pour venir en aide, en France et dans le monde entier, aux assurés Allianz Partners. Aujourd’hui, Allianz Partners  veille sur 1 Français sur 4 au travers des ses marques Allianz Travel et Mondial Assistance. Nous allons nous intéresser ensemble aux enjeux liés à ce type de service et aux exigences que cela demande en terme d’expérience client.

Pascal a été speaker de la 5ème édition des Sommets du Digital, accompagné de l’équipe Allianz Partners, partenaire des Sommets.

  • Il existe toujours une dualité entre humain et digital. Chez Allianz Partners France, vous avez développé des services d’assistance en ligne, mais gardez une priorité au contact direct avec les hommes et les femmes. Est-ce que ça veut dire que le digital ne peut pas être plus humain ?

    Le digital et l’humain… C’est vrai que c’est la grande question que se posent aujourd’hui les entreprises. En tant que consommateur, par exemple, on n’imaginerait pas réserver un hôtel par voie téléphonique alors qu’on peut le faire en quelques clics, ça nous paraît totalement naturel. En même temps, en entreprise, on voit bien qu’il y a un décalage. On se préoccupe de la disparition de l’humain, on se demande ce que va devenir cette société qui s’automatise de plus en plus. Ces deux idées, nous allons les observer durant cet échange. À titre personnel, j’ai un background d’informaticien. C’est ma formation d’origine. Par ailleurs, j’ai aujourd’hui la responsabilité des 1 500 chargés d’assistance de nos plateformes françaises. On retrouve aussi ici cette dualité entre l’humain et le digital. Les entreprises se disent qu’avec le digital, elles vont gagner en efficacité. De manière objective, ça améliore les processus et ça change l’expérience des clients. Il y a un risque qu’il faut prendre très au sérieux : c’est celui de se priver d’une relation, qui deviendrait efficace mais sans émotion avec ses clients. Ça pourrait devenir impersonnel, et même non-différenciant. Si tout le monde tend vers cela, les marques ne se distingueront plus par une signature en matière de service. Vous l’avez dit : dans notre cas particulier, chez Allianz Partners, quand on nous appelle – entre 20 et 25 000 fois par jour –, on ne le fait pas parce que tout va bien. Quand on nous appelle, il y a systématiquement un problème. Qu’il s’agisse d’une panne de voiture ou d’un accident à l’autre bout du monde, on attend avant tout d’Allianz Partners de rassurer et d’écouter. L’empathie est un élément-clé de l’assistance. Et pour autant, le digital est lui aussi un élément-clé dans la relation que nous avons avec nos assurés. Il n’y a pas d’assistance sans émotion puisqu’on transmet à travers cette émotion le fait qu’on est là pour tenir par la main ou l’épaule notre assuré, et lui dire que quoi qu’il advienne, on sera à ses côtés. Un Français sur quatre est couvert par Allianz Partners, au travers de ses marques Mondial Assistance et Allianz Travel. Ce que je vous dis là, nous le constatons chaque jour, auprès de nos équipes, sur nos plateformes, 7j/7, 24h/24.

  • Avec les nouvelles technologies imitant des comportements humains, on peut se dire que dans quelques années, on pourra peut-être répondre aux clients de façon plus humaine, mais avec des procédés digitaux. Est-ce juste ?

    Le digital entre dans notre vie quotidienne d’assuré, de consommateur, dans nos entreprises. Il est vrai qu’on observe des solutions de chatbots, de voicebots, de serveurs vocaux intelligents, d’intelligence artificielle, pour parler d’exemples précis de technologies. Elles entrent dans nos services, de gré ou de force parfois, d’ailleurs, il faut bien le reconnaître. Je vais prendre un exemple pour vous illustrer comment le digital peut transformer le métier d’Allianz Partners et comment, par quelle posture, on a voulu prendre en compte ces évolutions qui sont majeures. Il y a 10 ans – ce n’est pas si vieux, c’est l’arrivée du fameux iPhone et donc de cette connectivité à distance –, dans le cas précis d’un véhicule qui tombe en panne, l’assuré nous appelait au téléphone. Il composait un numéro, se présentait en disant son nom, son adresse, donnait la marque de sa voiture et expliquait où il était en panne. Il pouvait éventuellement dire où il se rendait, s’il avait des bagages avec lui et qu’il fallait le prendre en charge pour l’acheminer à sa destination. En quoi la technologie, le digital, pourrait l’aider ? Ce qui est magique avec le digital, c’est que la plateforme d’assistance va savoir immédiatement qui vous êtes – l’iPhone va le transmettre à la plateforme –, quelle est la compagnie qui vous couvre, votre contrat et les garanties qui y sont associées. Elle va aussi pouvoir vous géolocaliser très facilement. Et enfin, vous pourrez dire ce qui vous arrive. Un chargé d’assistance va vous aider. J’insiste sur ce point parce que nous faisons le pari qu’il faut garder et même offrir systématiquement la possibilité d’être en contact avec un individu, un être humain pour vous aider. Il va alors traiter votre demande en ayant à sa disposition tous ces éléments sans que vous ayez à préciser quoi que ce soit. C’est quand même beaucoup plus confortable. Lorsqu’on a un pépin, être reconnu, ne pas avoir à raconter tout ce qui vient de nous arriver est extrêmement confortable. On fait beaucoup d’enquêtes client pour s’assurer de ces points-là. Cela ressort systématiquement. On peut aussi aller au cran suivant. Grâce à la technologie – chez des constructeurs tels que BMW –, si un véhicule est en panne, la plateforme d’assistance va savoir par la connectivité quelle est la nature de la panne. Encore plus magique, nous avons la capacité de rebooter les véhicules à distance. Pour reprendre des exemples de chatbots et de voicebots : ce sont pour nous des facilitateurs d’accès, mais ils ne se substituent pas à cette relation que nous voulons humaine. On souhaite de « l’omnicanalité », c’est-à-dire permettre à l’assuré de choisir au vu des circonstances, de son âge, de sa personnalité, de la situation qu’il rencontre, le canal pour nous joindre.

     

  • Allianz Partners, vous touchez à peu près un quart de la population française, ce qui implique une grande diversité de situations et d’individus. De ce fait, il y a une forte probabilité pour que les clients ne soient pas pour l’usage de ces outils digitaux. Comment gérez-vous l’inclusion liée au digital ?

    Il est vrai qu’on se pose toujours la question dans un service comme le nôtre. Personnellement, je suis assez « digital orienté », quand je peux, je passe par le digital, mais je ne suis qu’un exemple parmi tant d’autres. Offrir ce choix, être inclusifs est pour nous un élément de notre posture absolument essentiel. A contrario, on ne veut pas opposer le digital à l’humain, parce qu’on est convaincus chez Allianz Partners que le digital va renforcer la relation humaine. J’ai la conviction que plus notre monde sera digital – il le devient très largement –, plus l’humain jouera un rôle clé, parce qu’il prendra alors un relief supplémentaire, et parce qu’en tant qu’individus, nous attendrons encore plus de l’humain. Ça nous rendra d’ailleurs sans doute plus exigeants dans nos relations humaines, mais ça, c’est plutôt une bonne nouvelle !

  • Quels sont les technologies et les outils que vous utilisez pour anticiper au mieux certaines situations, qu’elles soient qualifiées de typiques ou récurrentes, pour chacun de vos clients ?

    Nous observons toutes les technologies parce que nous souhaitons voir en quoi elles vont enrichir la relation avec nos plateformes d’assistance et nos chargés d’assistance, mais aussi en quoi nos clients, nos consommateurs, vont se l’approprier. C’est un point essentiel. On a évoqué le fait qu’on peut connaître à distance le problème d’un véhicule qui tombe en panne, parce que des codes sont échangés entre le véhicule et nos plateformes d’assistance. Tout ça, évidemment, est géré en toute transparence avec l’assuré et en toute conformité avec la RGPD, il va sans dire. L’étape d’après sera sans doute le prédictif. Les pannes de véhicule, pour reprendre un exemple concret, peuvent être aujourd’hui, grâce à ces échanges de données, en partie prévues. Une batterie, après deux ou trois ans d’usage, a de forts risques de cesser de fonctionner. Un matin, vous ne pourrez plus démarrer. Ce n’est pas dramatique, c’est juste très enquiquinant selon votre emploi du temps. Aujourd’hui, vous savez à travers un voyant sur votre tableau de bord quand ça fonctionne. Personne ne regarde vraiment ces voyants à l’usage, on s’en rend bien compte. Dans un temps pas si lointain, nous saurons dire qu’un véhicule va tomber en panne. Soit le conducteur gèrera cette alerte – mais nous avons de plus en plus de points d’alerte à gérer en tant que consommateurs : maison, lave-vaisselle, voiture… –, soit des entreprises comme Allianz Partners, de par leur capacité à gérer ces flux d’informations, de data, et autres prestataires, peuvent intégrer cette situation. Dans le cas de la batterie, elles peuvent faire en sorte d’être alertées à votre demande qu’il y a un pépin à venir sur la batterie et de faire transférer votre véhicule dans un réseau agréé pour la changer sans que vous n’ayez rien à faire. On récupère les clés de la voiture – si clé il y a encore, d’ailleurs –, on transfère le véhicule chez un prestataire compétent disponible – parce que la technologie nous permet de savoir s’il l’est –, et vous pouvez continuer votre journée sans même avoir été inquiété par ce problème. On conviendra qu’il n’est pas un problème majeur, mais qui vous aurait quand même compliqué votre journée. On peut se dire cela pour beaucoup de domaines de la vie. Ce qu’on appelle « l’alerting », c’est-à-dire de monter d’un cran et de savoir qu’il y a eu ou qu’il va y avoir un pépin, nécessitera des gestionnaires de ces alertes pour savoir si c’est critique ou secondaire, et surtout quelle est la réponse à apporter. Dans le plan stratégique d’Allianz Partners et de notre groupe, il y a l’utilisation de toutes ces capacités technologiques, humaines, d’organisation de réseaux et de gestion de flux, pour se mettre au service de cette évolution, qui est finalement une évolution de société. Elle va bien au-delà du seul domaine d’activité d’Allianz Partners.

  • Pour répondre à tous ces enjeux, vous avez une équipe composée de 1 500 personnes disponibles 7j/7, 24h/24. Comment faites-vous pour assurer une qualité de service homogène ?

    C’est une question qui nous est souvent posée parce qu’il est vrai que quand on parle de notre métier, il est assez captivant d’expliquer que 24h/24, 7j/7, on intervient dans tous les domaines de la vie d’un client, et ce 20 à 25 000 fois par jour. Avant tout, c’est pour nous une posture qui compte. Venir en aide n’est pas à la portée de tous. On le voit d’ailleurs quand on recrute : il y a durant les phases de formation un certain nombre de collaborateurs qui ne restent pas ou à qui nous demandons de ne pas rester. Venir en aide n’est pas fait pour tout le monde. Il faut avoir cette envie et cette posture – ce mot est très important pour nous. Celle-ci est homogène sur nos plateformes. Tous nos collaborateurs ont une empathie XXL. Ils sont avant tout très attachés à écouter et rassurer. Ils ont évidemment suivi des formations à la relation client pour s’exprimer convenablement, avec des mots clairs, ne pas jargonner, se mettre à la portée de chacun de nos clients. Un Français sur quatre étant client, forcément, tous les tempéraments s’expriment. Il est important de laisser à nos collaborateurs une grande latitude, laisser leur intelligence émotionnelle s’exprimer, pour qu’ils s’adaptent à chacune des situations. Avoir un problème dans sa salle de bain et appeler Allianz Partners, ou appeler depuis l’Inde parce qu’un de ses enfants est malade, ce n’est pas du tout le même propos lorsqu’on est soi-même concerné et on n’attend pas la même réponse non plus. Tout ce qui serait trop standardisé dans la relation, nous l’évitons. Comment fait-on pour s’assurer qu’on remplit bien ce rôle ? Depuis de nombreuses années, nous interrogeons nos clients. C’est classique, nous utilisons le NPS – le Net Promoter Score –, et nous sommes assez fiers d’avoir des NPS situés entre 75 et 85, donc un niveau de service très élevé. On n’en attendrait pas moins d’Allianz Partners qui assure des clients qui peuvent rencontrer des problèmes importants.

  • Si vous deviez citer un sujet de transformation majeur pour les entreprises dans les années à venir, quel serait-il ?

    Toutes les organisations s’interrogent sur la transformation, en particulier en ce moment. Quel pourrait être ce sujet de transformation si on ne pouvait n’en citer un ? Pour ma part je dirais que c’est : percuter les idées reçues. J’entends par là qu’il faut qu’on regarde nos clients en changeant nos lunettes. Il ne faut pas les regarder tels qu’ils étaient et tels qu’ils évoluent, mais tels qu’ils sont devenus. Quel est le client d’aujourd’hui ? Encore une fois, certaines demandes digitales sont encore faibles mais elles vont considérablement augmenter. Percuter les idées reçues, c’est accepter l’idée qu’on va regarder les interactions humain/digital sans apriori. Certaines ne fonctionnent pas. Dans certains cas de figure, les clients ne souhaitent pas utiliser de solution digitale. Il faut alors proposer et utiliser une autre solution. On a tous été confrontés en tant que consommateurs à des prestations de service proposées en ligne sur lesquelles il n’y avait aucune échappatoire. On se dit alors qu’on aurait bien aimé avoir le choix. Percuter les idées reçues, c’est aussi savoir ouvrir sa réflexion pour proposer le choix et être inclusif, parce que n’oublions pas que nous nous adressons à tous. « L’omnicanalité » est un élément-clé. Il faut savoir et oser revenir sur son choix d’une solution digitale très efficace et qui rend de grands services à l’entreprise parce qu’elle permet aussi de simplifier les traitements en interne, mais qui ne correspond pas à ce que les clients recherchent. Les clients sont absolument essentiels pour nourrir la stratégie de l’entreprise et son chemin de transformation.

  • Pour mener tous ces changements, quelles sont aujourd’hui vos sources d’inspiration ?

    À titre personnel, depuis dix ans, je trouve beaucoup d’inspiration en me rendant au Consumer Electronics Show de Las Vegas, en janvier. Ce salon, le CES, se tient dans le Nevada depuis de nombreuses années. Je m’y suis rendu chaque année ces dix dernières années. C’est presque la visite du magasin du père Noël. C’est une grande source d’inspiration. Ce salon a la particularité – on en parle de plus en plus par voie de presse – de regrouper plus de 200 000 participants du monde entier. On n’y voit pas les changements en cours en France, mais dans le monde entier. On y voit des trends. La journée y commence dès 8H par une conférence d’un dirigeant d’un grand groupe. L’an dernier, c’était la CEO d’IBM qui nous a parlé de data, c’était absolument passionnant de voir la stratégie d’une entreprise comme IBM. On y voit aussi un grand nombre d’innovations. Certaines, avouons-le, sont complètement ratées et superflues, « gadgetées ». D’autres vous donnent une idée des trends, de comment la transformation s’opère, de comment on peut récupérer la data et apporter un service qui n’existait pas auparavant.

  • Auriez-vous un petit mot à partager avec les participants des Sommets du Digital ?

    Je suis ravi d’aller aux Sommets du Digital parce qu’on va avoir le plaisir de se retrouver, d’échanger entre nous mais aussi de confronter nos points de vue ! Cette notion d’humain/digital est à remettre en question en permanence. Comment transformer notre société ? Il y a aussi le sujet de la formation, la société va plus vite que les entreprises ou les écoles : comment former ? On aura aussi le plaisir d’aborder ces sujets-là. Il est important d’avoir l’esprit très réceptif pour ces échanges. C’est un moment privilégié. On va prendre de la hauteur. C’est aussi souvent l’occasion de grandes rencontres parce qu’on est tous dans des vies de plus en plus rythmées. On ne prend pas toujours le temps de la réflexion, d’aller au bout de nos rencontres et de voir comment nos interactions vont aider à envisager des solutions digitales encore plus efficaces. J’en attends beaucoup de choses, à la fois prospectives mais aussi très concrètes, des échanges d’expérience. Ce qui n’a pas marché dans telle entreprise peut marcher dans telle autre : pourquoi ? Il faut comprendre pourquoi il faudrait changer quelques paramètres pour que ça fonctionne. Ça nous permettra aussi d’observer la société sous tous ses angles, parce que nos secteurs d’activité, aux Sommets du Digital, sont tous d’origines assez différentes. Bref, ce sont quelques jours très excitants où on va pouvoir se poser ces questions-là, j’ai hâte de vous y retrouver !